Le Congrès national africain (ANC) a été créé le 8 janvier 1912. Il vient de fêter ses 100 ans dans le stade de la ville de Bloemfontein, à 600 km de la capitale Pretoria.
Après des décennies de lutte contre l’Apartheid et une accession au pouvoir depuis 1994, l’ANC est un parti dans l’Etat car il suffit en fait d’une décision interne de l’ANC pour changer le chef d’Etat du pays. La démocratie sud-africaine est dépendante de la démocratie à l’intérieur de l’ANC.
L’ex-Président Thabo Mbeki, discret depuis sa sortie par le parti en septembre 2008, en a fait l’amère expérience ; il était présent comme tous les dignitaires du parti, une quarantaine de chefs d’Etat majoritairement africains et plus de 100 000 personnes dont Winnie Mandela.
Avec une majorité confortable aux élections législatives du 22 avril 2009, l’ANC gouverne avec 65,9 % des voix, soit une majorité absolue avec 264 sièges sur 400 à l’Assemblée nationale.
Empêché pour des raisons de santé, absent, Nelson Mandela de ses 93 ans, les a soutenus moralement. En 17 ans de pouvoir, l’ANC a su préserver l’unité nationale arc-en-ciel et Mgr Desmond Tutu y est pour beaucoup avec le travail remarquable de la Commission Vérité et Réconciliation. La démocratie fonctionne avec une grande indépendance de la presse, du parlement, de la justice et une liberté de ton des partis d’opposition.
Des grandes villes comme le Cap sont dirigées par l’Alliance démocratique. C’est plutôt au plan économique et social que le bilan de l’ANC est mitigé. Les gouvernements blancs de l’Apartheid n’ont rien fait pour les Noirs. La stratégie économique de l’ANC est basée sur la création d’une classe moyenne surtout dans le secteur tertiaire. Le BEE, le Black Economic Empowerment est le programme de développement économique fondé sur une préférence des Noirs dès lors qu’il faut choisir entre un Noir et un Blanc disposant d’une même qualification pour un poste.
Une forme de discrimination positive qui n’a pas permis véritablement de réduire les inégalités, ni le chômage des Noirs. Plus de 40 % des Noirs sont au chômage et le manque de compétences conduit à intégrer les Noirs des pays voisins (Zimbabwe).
Les inégalités n’empêchent pas de voir des Noirs devenir des milliardaires et se comporter comme de véritables agents du capitalisme sauvage, bénéficiant parfois de facilités que de nombreux observateurs qualifieraient de corruption. L’absence de sanction contre les anciens de l’ANC a conduit à des erreurs stratégiques comme le fait de ne pas avoir anticipés les ravages du Sida en s’enfermant sur des positions dogmatiques, notamment au temps de Thabo Mbéki. Mais dès 2009, l’équipe de Jacob Zuma a redressé la barre.
Là où tout le monde attend l’ANC, c’est sur le foncier. 80 % des terres n’ont pas changé de propriétaires et sont dans les mains des Blancs. C’est d’ailleurs cette situation qui a radicalisé les jeunes noirs, majoritaires dans le parti ANC. Du coup, ces jeunes tendent à opter pour des positions extrémistes dès lors que leurs revendications ne trouvent pas d’échos dans le parti. Le chef de la jeunesse ANC, Julius Malema, suspendu pour cinq ans par l’ANC pour ses déclarations intempestives n’est pas un épiphénomène.
Les risques d’une division-scission interne sont réels. La ligne centriste suivie par Jacob Zuma ne donne pas de résultats probants au plan de la création d’emplois, notamment des jeunes. Le sport ne peut sauver tout ceci. Alors, en référence aux pratiques ancestrales, les 100 années de l’ANC ont été célébrées avec une cérémonie de purification suivie d’une libation où un taureau noir a été sacrifié à la sagaie pour obtenir la protection de Dieu et des ancêtres. Une seconde cérémonie s’est déroulée dans l’église du township de Bloemfontein qui a vu la naissance du parti ANC en 1912. On verra bien ce que 2012 va réserver à l’Afrique du Sud. YEA.
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