Avr 182012
 

L’incertitude entourant la fourniture d’électricité a un impact significatif sur la croissance économique et la productivité.

L’incertitude que connaît le secteur de l’électricité en Afrique du Sud représente l’un des plus grands freins à une croissance économique soutenue. L’incapacité du ministère de l’Énergie, d’Eskom et du Régulateur national de l’Énergie (Nersa) à coordonner la mise en place d’un cadre d’action global impacte de façon très négative à la fois les consommateurs et les producteurs d’énergie.

Bien qu’Eskom se soit récemment lancé dans un programme massif d’investissements, le gouvernement n’est pas parvenu à injecter dans le réseau de nouvelles capacités en mesure de satisfaire la demande croissante. La faute en incombe partiellement à de longs délais de livraison, mais l’inaptitude à produire un cadre réglementaire favorable à l’investissement ainsi qu’à la participation du secteur privé pour combler les manques en approvisionnement énergétique en est aussi largement responsable.

Le ministère discute en ce moment, avec des promoteurs potentiels et des producteurs d’énergie indépendants, de l’opportunité d’intégrer au réseau national des producteurs privés, que ce soit de charbon, de gaz ou d’énergie hydraulique. Il est à espérer que cela ouvrira une nouvelle porte d’entrée au secteur privé dans le domaine énergétique.

Au cœur de la question de savoir comment stimuler l’investissement privé dans le domaine énergétique, il y a l’incertitude concernant les structures tarifaires. C’est particulièrement vrai pour le secteur de l’énergie renouvelable, où de constantes révisions des projets de lois sur l’instauration d’un « programme de tarifs de rachat garanti pour les sources d’énergie renouvelable » ont découragé les investisseurs, avec pour conséquence que le processus de régulation de la vente d’énergie renouvelable, initié en 2007, tarde toujours plus à porter ses fruits.

L’incapacité du gouvernement à développer un cadre énergétique qui incorpore de manière adéquate le secteur privé a permis à Eskom d’engranger de substantiels profits tout en ayant du mal à satisfaire la demande. En novembre dernier, Eskom a publié un résultat semestriel en hausse de 35%, passant de 9,5 milliards de rands à 12,8 milliards. On attribue cette croissance du chiffre d’affaires essentiellement à l’augmentation des tarifs, ce qui a conduit certains à s’interroger quant au niveau des hausses de prix.

Des désaccords entre le ministère et Nersa quant à la meilleure manière de réglementer ce service public ont aggravé les choses. L’année dernière, le gouvernement a indiqué qu’il voulait changer radicalement la méthode de calcul utilisée par Nersa pour fixer les tarifs d’Eskom pour l’électricité. En 2010, Nersa avait validé une augmentation de 24,8% à compter du 1er avril de cette année-là, ainsi que des augmentations de 25,8% et 25,9%, pour respectivement l’année dernière et l’année en cours. Ces hausses avaient été jugées nécessaires au financement des coûts d’exploitation et financiers croissants. Et voilà que Nersa a déjà dit ce mois-ci que les tarifs augmenteraient de 16% « seulement ».

Cela s’est fait après qu’Eskom a demandé que l’augmentation soit revue à la baisse, ses profits ayant été supérieurs aux prévisions.

Bien que l’annonce d’une hausse des tarifs inférieure aux prévisions ait été accueillie avec soulagement par les consommateurs, cela arrive trop tard pour contrer l’inflation. Pour l’essentiel, les projections inflationnistes basées sur les hausses de tarifs validées en 2010 ont déjà été prises en compte par les marchés. Si les bénéfices supplémentaires d’Eskom ne sont pas utilisés de manière efficace, cela entraînera de facto une augmentation du coût supporté par le Sud-Africain moyen.

Les incertitudes entourant la fourniture d’énergie a un impact significatif sur la croissance économique et la productivité. Les prévisions de coupures de courant et les avertissements lancés par Eskom pour dire que l’approvisionnement continuera d’être tendu découragent l’expansion économique. Si les 6 mois de retard pris par le projet électrique de Medupi n’auront apparemment aucun effet sur le rapport entre l’offre et la demande, les autorités ont prévenu que le système restera tendu pour les cinq ans à venir, en particulier les deux prochains.

Le Mail & Guardian a récemment rapporté qu’Eskom a payé des industriels gros consommateurs d’énergie pour qu’ils arrêtent leurs fonderies pendant une période allant jusqu’à trois mois afin de soulager le système. Cela va dans le sens d’une meilleure gestion de la demande, mais c’est un désastre du point de vue de la croissance économique prise dans son ensemble.

Traduction Jean Pierre et Wendy Richard