Déc 022011
 

JOHANNESBOURG – Les observateurs indiquent à Mining Weekly que le développement d’initiatives « vertes » et de projets écologiques concernant l’extraction minière deviendra une option de plus en plus viable économiquement pour l’industrie minière.

Bien qu’initialement il puisse s’avérer coûteux d’engager ou de mettre en pratique des programmes environnementaux qui seraient en adéquation avec les lois environnementales Sud Africaines, les bénéfices qu’une compagnie minière peut tirer à long terme de sa position « verte » pourraient être une option plus viable pour l’industrie, selon les observateurs.

La conformité environnementale et les considérations de coût pour l’avenir deviendront des exigences majeures dans le monde des affaires. Cela aura un impact sur l’industrie minière qui, pour se développer devra prendre en compte et sérieusement la protection de l’environnement sinon le financement de telles mesures en sera réduit, ont ajouté ces experts.

Au séminaire de réflexion AngloGold Ashanti/Motjoli – Pour un Changement dans l’Exploitation Minière, qui s’est tenu à Johannesbourg, le Dr Iraj Abedian, Directeur Général de Pan-African Capital, a défendu le concept d’une activité minière engagée dans la gestion et la protection de l’environnement en la présentant comme étant, potentiellement, une activité de production qui pourrait s’imbriquer avec d’autres secteurs comme l’agriculture ou l’industrie légère.

L’exploitation « propre » attire les investisseurs

L’accès à l’investissement est plus facile pour des projets respectueux de l’environnement. Le concept de « finance verte » et d’investissement responsable doit conduire les investisseurs à exiger une production régie par des normes « durables ».

De plus, la non-conformité avec la législation environnementale, qui devient de plus en plus rigoureuse avec le temps, peut cependant s’avérer coûteuse sur le long terme pour l’industrie minière. Cela pourrait entraîner des mises en cause des dirigeants tenus pour responsables de non respect des règles, des fermetures d’entreprises, des arrêts de l’activité, des délais, des annulations de licences, des frais de justice, des  pénalités financières, des investisseurs perdus et des frais d’avocat, alors que tout ceci peut être évité.

Durant le processus d’évaluation d’un projet, en plus des coûts de fonctionnement traditionnels, les mines commencent à prendre en considération les risques financiers d’une non-conformité avec la législation environnementale, nous dit le directeur du Développement Durable et du Changement Climatique, consultant Deloitte & Touche, Duane Newman.

Les coûts énergétiques élevés et les pressions publiques en faveur d’un développement durable plaident pour une activité minière écologique, et les compagnies sont en train de réaliser que leurs opérations pourraient être plus viables si elles étaient plus écologiques.

La rentabilité de l’industrie minière, connue pour sa consommation d’énergie intensive et ses procédés coûteux, reposait sur une électricité à bas prix. Mais en raison de l’augmentation du prix et des fluctuations du stock d’électricité disponible en Afrique du Sud, on voit apparaître une volonté de réduire la dépendance du pays au charbon et d’étudier des sources d’énergie alternatives, dit Newman.

« L’augmentation du prix de l’électricité a une influence sur les opérations de minage existantes ou futures et les compagnies minières observent la trajectoire des prix de l’énergie sur le long terme ainsi que l’avancement du défi pour une activité minière durable », dit-il.

Ceci a conduit certaines compagnies à étudier des projets de centrales de cogénération, gourmandes en investissement initial mais potentiellement  plus rentables sur le long terme. Notamment si certaines politiques gouvernementales attendues entrent en vigueur, telles qu’une défiscalisation accrue, des subventions et autre avantages au crédit carbone.

Cependant, l’énergie renouvelable coûte, encore, plus cher comparée à celle que fournit la centrale publique au charbon Eskom. L’énergie solaire coûte actuellement environ R2.20 kW/h, avec une baisse de 15% par an, tandis que l’énergie produite par Eskom est facturée R0.60 kW/h mais en  augmentation de 25% par an.

Pour le Michael Seeger, développeur dans les mines de charbon au photovoltaïque solaire, l’industrie sud-africaine n’envisagera sérieusement un passage à l’énergie renouvelable que lorsque l’électricité produite par le charbon viendra à disparaître ou deviendra trop chère.

L’activité minière constitue le plus grand secteur industriel en Afrique du Sud, qui nécessite les plus gros budgets, notamment dans le secteur de la  recherche. Beaucoup plus importants que celui des produits manufacturés. Une place économiques et des moyens qui lui imposent d’étudier toutes les solutions durables si elle veut continuer ses activités, ajoute-t-il.

Pour Packham, les nouvelles mines devraient commencer à réfléchir aux moyens de réduire leur dépendance électrique au réseau national et donc de générer leur propre électricité, ce qui représenteraient une économie durable tout en atténuant l’impact des opérations minières sur l’environnement.

L’électricité est la voie du futur et si une installation minière possède une centrale indépendante, a fortiori si c’est de l’énergie renouvelable, et qu’elle est capable de répondre aux besoins de deux mines, par exemple, il ne devrait pas s’avérer trop difficile de trouver le financement de tels projets, affirme Pakham.

La production d’énergie renouvelable peut aussi être envisagée comme une autre source de revenus pour une compagnie minière, faisant de la domestication d’une énergie produite par le vent, le soleil ou la biomasse, une opportunité commerciale pour l’entreprise.

Environnement et formation

Newman nous dit que, si la protection environnementale est de plus en plus prise au sérieux par les compagnies minières, certains problèmes ne sont toujours pas traités. La réduction de l’impact écologique nécessite une équipe avec des capacités adaptées, qui pose les bonnes questions et qui met en œuvre les procédés adéquats. De plus, étant donné que les compétences et le savoir requis ne peuvent pas se retrouver dans une seule et même organisation, des spécialistes et des partenaires doivent aussi également être consultés.

Ainsi, il sera de plus en plus difficile pour les compagnies minières de passer outre les régulations avec l’arrivée de rapports intégrant l’activité industrielle globale, le grand public et les défenseurs de la cause écologiste les exigent de cette façon. Les rapports doivent combiner les résultats financiers et l’historique des relations de l’entreprise et leur conformité avec la législation sur l’environnement. Les compagnies les plus en avance sont en train de mettre en œuvre la manière la plus transparente de rapporter cette information.

La directrice exécutive du Centre pour les Droits Environnementaux, Melissa Fourie, insiste sur la nécessité d’arriver à un système unique d’estimation d’impact sur l’environnement, piloté conjointement par les autorités compétentes sur l’eau et l’environnement, qui permettrait de rationaliser et de rendre plus efficace le processus de délivrance d’autorisation.

« Le cadre légal pour cela existe déjà dans une loi promulguée en 2009- au terme d’années de négociation – il manque seulement le décret d’application que le Ministre des Ressources Minérales doit promulguer. Un retard qui profite à certaines compagnies pour ne pas entreprendre de réformes et maintenir des attitudes irresponsables en terme d’environnement, voire de pratiquer des extractions illégales », déclare  Melissa Fourie.

Ce processus d’autorisation, de surveillance accentuée et d’application de sanctions nécessite des moyens financiers et humains  et une volonté gouvernementale.

Melissa Fourie suggère de financer ces résolutions par le biais d’une taxe annuelle payable par les compagnies minières indexée sur le risque pour l’environnement et qui tienne compte des antécédents de l’entreprise vis à vis des réglementations de protection de l’environnement. Comme cela se fait ailleurs dans le monde.

« Une surveillance renforcée entraîne une amélioration des performances, et nous avons besoin de rapports d’activité plus efficaces, plus transparents et plus responsables au sein de l’industrie dans son ensemble », nous dit Fourie.

En ce début d’année, le Centre pour les Droits Environnementaux et le Centre pour la Promotion de la Démocratie Ouverte ont demandé à 30 des plus grandes compagnies minières de publier sur leur site Internet le contenu de leurs permis environnementaux pour les rendre accessibles au public ; seules deux de ces compagnies ont accepté.

« Les autres compagnies ont tour à tour cité le coût que représente la publication de tels permis, les ‘dangers’ de fournir trop d’information au public ou encore nous ont renvoyé vers le Ministère des Ressources Minérales qui a fourni des documents de manière partielle : 13% des demandes de permis contrairement à ce qu’exige la loi sur la Promotion de l’Accès à l’Information », nous explique Melissa Fourie. « Nous n’acceptons pas de telles excuses et nous interprétons cette réticence comme un manque d’engagement envers un management transparent et responsable. Les permis devraient être des documents publics. »

Impact positif sur les communautés locales

Pourtant, affirme à Mining Weekly Peter van Kerckhoven, directeur adjoint des Investissements pour Nedbank Capital, les compagnies minières se rendent compte de l’impact positif qu’une activité minière écologique a sur la qualité et la stabilité des relations avec les communautés locales.

Van Kerckhoven met en avant la nécessité de lier les éléments socio-économiques et la protection de l’environnement et le développement durable. Un défi qui prend de l’importance dans le quotidien des compagnies minières.

Comme ces compagnies emploient beaucoup de monde et que nombre d’entre elles opèrent au sein de communautés rurales, des pratiques environnementales sérieuses ainsi que des initiatives visant à l’amélioration des conditions sociales sont les clés de la pérennité de l’exploitation minière.

De nombreuses demandes de crédit que Nedbank Capital reçoit sont destinées à la création de projets durables au sein de la communauté où opère la mine, ainsi qu’à des développements sociaux et économiques en mesure de survivre après la disparition de la mine.

Le rapport d’Erst & Young Les risques économiques pour l’industrie d’extraction minière et métallique de 2011 à 2012 indique que le risque de perdre sa licence pour une compagnie classée n°4 dans le top des 10 des risques économiques 2011-2012 est beaucoup plus important. D’autant plus que de nouveaux critères sont pris en compte tels que les performances écologiques, la sécurité et la question du droit des sols.

« Des difficultés peuvent survenir concernant l’impact sur l’environnement de nouvelles mines ou de mines déjà existantes, ainsi que pour des opérations d’extraction métallique. Des questions telles que l’impact sur la biodiversité, l’extraction et la pollution de l’eau, les émissions de CO2, la contamination du sol et la gestion des déchets sont souvent des soucis importants pour les communautés locales et les personnes en charge d’appliquer la réglementation », précise le rapport.

Quelques exemples

Pour Van Kerckhoven, les compagnies minières sont mieux placées que d’autres industries dans le développement de projets durables, du fait de leur importance et de leurs programmes qui ont toujours comportés, dans le passé, une partie socio-économiques et aujourd’hui environnementale. Des projets que ces grandes compagnies nationales et internationales ont les moyens de gérer et mettre en oeuvre.

C’est ainsi que le groupe Anglo American Thermal Coal dans son projet de construction de logements, d’une valeur de R28.1 millions (1€=10 rands), utilise les déchets de l’extraction du gypse tandis ainsi que les produits résiduels du processus de cuisson

Le gypse est récupéré dans les eaux souillées de l’extraction de charbon par Anglo American et BHP Billiton dans la province du Mpumalanga, cette récupération des eaux fait partie du projet « zéro déchets et réduction des émissions de gaz carboniques».

Le projet Forêt Ongoye de BHP Billiton Aluminium Afrique du Sud implique la restauration de 500ha de forêt dégradée et menacée, fournissant ainsi un évier pouvant absorber entre 60 000 et 125 000 tonnes de dioxyde de carbone sur une période de 20 ans. Outre la promotion de la restauration écologique, ce projet a pour but la conservation des plantes médicinales, explique Nedbank Capital.

Le projet agricole de First Quantum Minerals’ Kansanchi Mining a pour objectif la conservation et la régénération du sol, tout en améliorant la sécurité alimentaire. Ceci implique une perturbation minimale du sol, l’alternance des cultures et l’utilisation des résidus de cultures pour enrichir la couche d’humus.

Ce projet, lancé en 2010, devrait fournir de nouvelles sources de revenus pour les populations affectées par l’activité minière, de même qu’il peut possiblement ralentir, voire inverser, la déforestation.

Ecca Group a investi dans des technologies durables pour l’environnement de la compagnie d’origine australienne Eestach afin de réduire de façon significative les rejets de CO2 dans l’atmosphère. La technologie développée par Eestech se concentre spécifiquement sur la production d’électricité à partir de résidus de charbon et de biomasse, dit Packham.

La compagnie a également investi dans une technologie de turbine hybride au charbon et au gaz dans le but de réduire les rejets de CO2  libérées par l’exploitation mines souterraines. Un objectif propre à réduire les dépenses de l’industrie charbonnière liées au traitement des résidus.

Selon Pakham, l’installation industrielle peut utiliser des sources d’énergie de basse qualité, des charbon à forte concentration de souffre ou de cendres, des résidus de lavage des minerais, de la biomasse ou encore les déchets municipaux comme carburant pour créer de l’énergie et ainsi transformer les déchets en électricité..

Un projet de captation du méthane a été lancé à la mine Beatrix de Gold Field, à Welkom. Il a été reconnu en tant que Mécanisme de Développement Propre, en vertu les accords de Kyoto, par la Convention Cadre sur le Changement Climatique des Nations Unies, comme l’a rapporté Mining Weekly en septembre.

Ce projet de mine capte le méthane à la source, le gaz est ensuite amené à la surface où il est soit brûlé, soit utilisé pour produire de l’électricité. Grace à cette opération les émissions de carbone seront réduites de 1.7 millions de tonnes de CO2 entre 2011 et 2018.

Enfin, Coal of Africa Limited (CoAL), les Parcs Nationaux Sud-africains et le Ministère de l’Environnement ont signé un protocole d’accord pour la  préservation du site de Mapungubwe, estampillé Patrimoine Mondial, près de la charbonnerie de CoAL Vele, à Limpopo. Son  but est d’assurer l’intégrité du site historique au travers des programmes de compensation pour la biodiversité, qui incluent des objectifs de conservation du patrimoine naturel et culturels, de développement touristique et de gestion des ressources en eau.

Le PDG de CoAL, John Wallington, affirme que sa compagnie a placé la barre à un haut niveau en terme d’activité minière responsable, parce qu’elle est susceptible de s’aventurer dans des endroits de plus en plus sensibles.

Mining Weekly (L’Hebdomadaire de l’Activité Minière) du 21/10/2011

Par : Natasha Odendall

Edité par : Creamer Media Reporter

Traduit de l’anglais par Yann Richard.