Le 20 septembre, King Cobra, surnom du vieux routier de l’opposition zambienne, a été élu confortablement à la présidence de son pays. Mickel Sata en était à son quatrième essai, il a obtenu 43% des suffrages contre 36% pour le chef d’Etat sortant Rupiah Banda. Ce dernier avait été élu pour trois ans, en juin 2008, pour terminer le quinquennat en cours à la suite du décès du président Chiluba. Jusqu’au dernier moment les prévisions ont été incertaines et les jeux très ouverts.
La Zambie est un des pays les plus pauvres du monde qui vit au rythme du cours de ses matières premières, le cuivre, le charbon et le cobalt, mais dont le taux de croissance, cette année, devrait dépasser les 7%. Une année particulièrement riche en terme d’investissements étrangers, tout particulièrement chinois et indiens qui ont fait une percée sous la présidence Banda et qui provoquent un dynamisme économique qui a marqué la campagne électorale.
L’investissement chinois est spectaculaire. Prioritairement dans le secteur minier : cuivre, cobalt, charbon, la production électrique, mais également dans l’agriculture, le commerce et dans les hôpitaux où la pratique de la médecine traditionnelle chinoise est à l’honneur. L’ambassade de chine à Lusaka évalue à 2 milliards de dollars le montant de ces investissements. Cette politique était la pierre angulaire de l’action des président Chiluba et Banda pour vaincre la pauvreté.
En réponse, Mickael Sata n’a eu de cesse de dénoncer les conditions de travail dans les mines dirigées par des compagnies chinoises. Des « faux amis » comme il les a souvent qualifié, face auxquels il a brandi la menace de réhabiliter les 25% d’imposition sur les produits miniers, mesure abolie en 2009 par son prédécesseur.
La réforme des taxes minière a d’ailleurs été une des premières mesures annoncée par le nouveau ministre, Wilbur Simusa. Elle ne touchera pas seulement les entreprises chinoises mais également des compagnies internationales telles que la canadienne First Quantum Minerals, Vedanta Ressources et Glencore, basées à Londres et la sud africaine Metorex.
Le message a été remarqué et commenté dans un contexte régional marqué par de fortes pressions des Etats sur les compagnies étrangères, minières particulièrement. Au Botswana, où le gouvernement vient de signer une série d’accords avec les compagnies diamantaires qui devrait faire de Gaborone le centre du commerce mondial du diamant et qui annonce une profonde redéfinition de l’exploitation du charbon et un développement de l’industrie gazière.
En Afrique du sud les relations sont tendues entre les autorités et la chambre des mines dans l’éventualité d’une renégociation de la charte minière sur fond de débat sur les nationalisations qui divise la classe politique et de grèves salariales conduites par les syndicats miniers dont le puissant NUM (National Union Mineworkers)
Au Zimbabwe, où devraient se dérouler l’année prochaine un scrutin une nouvelle fois à haut risque, Robert Mugabe, multiplie les surenchères vis à vis des compagnies étrangères sur le plan des droits d’exploitation et de l’imposition.
Mickael Sata s’est donné trois mois inverser l’image de la Zambie, pays parmi les plus pauvre de la planète. En deux semaines le nouveau ministre des finances a mis fin au rêve d’implantation de la First National Bank sud africaine en Zambie en annulant la vente de la Finance Bank qui devait devenir une de ses filiales, son collègue des mines vient de suspendre provisoirement toutes les licences d’exportation de cuivre pour une plus grande transparence, l’aéroport international a été rebaptisé, le palais présidentiel a été ouvert à tous les citoyens et le vice président est un homme … Blanc. Les réactions internationales sont, pour l’instant, mesurées, les autorités sud africaines sont silencieuses et la presse ne commente pas, la Chine, en revanche, salue chaleureusement le caractère pacifique du changement de pouvoir.
Anne Dissez