Fév 072013
 

Gwede MantasheGwede Mantashe est en même temps, secrétaire général de l’ANC et président du Parti communiste sud africain (SACP), montrant ainsi l’interpénétration politique et organique, qui unit les deux formations. Ancien dirigeant du National Union of Mineworkers (NUM), il fut  le premier syndicaliste appointé au Board of Directors de la compagnie Samaman cor, listée à la bourse de Johannesburg.

La date précise de sa naissance n’est signalée dans aucun document, il est le seul dans ce cas parmi les personnalités du top six, dont il fait partie depuis son élection au poste de secrétaire général de l’ANC au congrès de Polokwane, en 2007. On sait  qu’il est né dans les années soixante à Lower Cala, un village situé dans l’ancien bantoustan du Transkei, aujourd’hui dans la province de Eastern Cape.

Après avoir été, dès 1982, mineur et militant du NUM dans les mines Matal Coal, il s’inscrit en 1997 à l’Université of South Africa (UNISA), la plus grande université par correspondance d’Afrique, où ont été diplômés de nombreux étudiants noirs à la fin des années d’apartheid. Il est, cependant, déjà investi dans le monde professionnel et politique, depuis 1995, il dirige une compagnie du secteur mining, energy and natural ressources : Samancor.

Il reçoit son diplôme de B.Comm de droit en 2002, une formalité puisqu’il est en même temps membre de la direction nationale du NUM. Il la quittera en 2006 pour s’investir dans l’appareil d’Etat.  En 2007, il devient Exécutive Director of Development Bank of South Africa (DBSA), et il est élu en septembre 2007 National Chairperson of South African Communist Party (SACP). La même année en décembre le congrès de Polokwane le consacre secrétaire général de l’ANC. Des postes qu’il occupe simultanément, jusqu’au dernier congrès du SACP, en juillet dernier, où il quitte la direction du parti communiste pour se consacrer officiellement à ses responsabilités dans l’ANC. Officieusement pour avoir les mains plus libres pour mener la bataille pour la réélection de Jacob Zuma à Mangaung.

Dans l’hypothèse d’une victoire de ce dernier, il brigue son maintien dans les plus hautes responsabilités et il sait que cela ne tient pas seulement à ses capacités politiques. Il en a fait l’expérience en 2002, où sa candidature avait été rejetée de la seule volonté de Thabo Mbeki, alors président, qui régnait en maître sur l’ANC. Un échec qui a forgé son opposition à l’ancien président, un an plus tard, aux cotés de Zuma, il est au cœur du complot qui met fin prématurément à la présidence Mbeki. Il fut d’ailleurs celui qui en fit l’annonce au monde.

Au poste de SG de l’ANC et parmi les top six (Kgalema Motlanthe, Baleka Mbete, Tandi Modise, Mathews Phosa), il est le plus solide soutien de Jacob Zuma. Selon  qui s’exprime, c’est un combattant ou l’homme des basses œuvres. Toujours aux avants poste des batailles à mener, toujours prêt à faire face aux coups les plus durs.

C’est lui que l’on a accusé d’avoir gonflé les listes des adhérents de la province du Kwazulu Natal, lors de la proposition des noms des futurs dirigeants à soumettre au vote des délégués à Mangaung. La province la plus décisive la plus nombreuse et théoriquement la plus acquise à Zuma. C’est également lui qui a dû mener la charge contre Julius Malema qui a conduit à l’exclusion de ce dernier. Il y a fait preuve d’une agressivité remarquée vis à vis d’un militant qui, a bien des égards, lui ressemble. Par sa pugnacité, sa verve et sa démagogie. Face au slogan de nationalisation des grands secteurs économiques, dont Julius Malema s’est servi pour asseoir son autorité politique en dehors de l’ANC, il a du le contrer alors que ce slogan sans être le sien explicitement correspondait à ses convictions profondes. « Les nationalisations n’appartiennent pas à Malema », disait-il il y a quelques semaines lors du conflit de Marikana.

Situation identique à propos des chants de lutte. Comme Malema, Mantashe est un adepte de ces démonstrations politico musicales tellement ancrées dans la vie politique sud africaine. Il a dû une nouvelle fois se convaincre que chanter « kill the boer, kill the farmer » n’était plus un acte révolutionnaire. On lui a même demandé de diriger la commission qui en a décidé ainsi.

Enfin, vis à vis de ses opposants, internes ou externes à l’ANC, il est particulièrement virulent. Mamphela Ramphele en a fait récemment les frais, qu’il a accusé de faire le jeu de Democratic Alliance, la pire des injures dans sa bouche. Mamphela Ramphele est une des femmes les plus brillantes de la scène intellectuelle sud africaine, première vice chancellor noire de la prestigieuse Université of Cape Town (UCT), Manager director de World Bank, héroïne de la lutte anti apartheid, ex compagne de Steve Biko dont elle a eu deux enfants, l’accusation a fait le tour de la classe politique.

Pourtant, malgré ou à cause sa personnalité, Gwede Mantashe est une des cartes les plus solides pour la réélection de Jacob Zuma à Mangaung en décembre prochain. En dépit de son âge, il fait partie de cette vielle garde du Parti communiste sud africain qui voue à Zuma et à l’ANC une confiance absolue, « the ANC will be the leading force for the next 100 years » déclarait-il dans une interview à Africa Report en septembre dernier.

Anne Dissez  Novembre 2012