Nov 012011
 

Congested : The Richards Bay coal terminal. Transnet is unable to deliver the freight it is capable of handling. (Vismedia)

Un réseau ferroviaire de fret allant du Botswana à travers le Zimbabwe jusqu’au Mozambique et le Malawi pourrait changer la donne de la logistique régionale et des exportations et menacer la domination sud-africaine dans ce domaine.

Le projet de réseau ferroviaire ‘Afrique australe’ de 1100 km, qui comportera de nombreuses correspondances, débouchera au futur Ponta Techobanine, un port en eau profonde au Mozambique qui pourrait rivaliser avec le Richards Bay Coal Terminal, arrivé à saturation, qui est actuellement le port principal pour l’exportation des matières premières d’Afrique du Sud.

On estime le coût du projet, qui doit démarrer en 2012 et prendra au moins dix ans, à 7 milliards de dollars, selon un rapport Bloomberg. D’après une banque commerciale, les principales sources de financement sont le pôle finance de la Banque Mondiale, la International Finance Corporation, la Banque Européenne d’Investissement, les sociétés minières et les gouvernements des pays d’Afrique australe.

Ce réseau géant et son port devraient réduire la dépendance de pays comme le Botswana aux réseaux de fret et  de routes sud-africains pour exporter leurs matières premières, menaçant ainsi le monopole de Transnet. Transnet, la société logistique paraétatique de l’Afrique du Sud, est attaquée de toutes parts à cause du manque d’efficacité de son réseau ferroviaire et des embouteillages dans les ports, ce qui limite les possibilités pour les sociétés qui extraient le charbon, le minerai de fer et le manganèse d’exporter leurs produits.

Dans sa déclaration de politique budgétaire à moyen terme, le Trésor a souligné les mauvais résultats du secteur minier en Afrique du Sud, dus en partie aux « problèmes de logistique, y compris certains dysfonctionnements du réseau ferroviaire et les coûts portuaires élevés ». La valeur ajoutée dans le secteur minier en Afrique du Sud stagnait entre 2001-2008, comparée à une croissance de 12% dans des pays comme la Chine, selon la déclaration budgétaire.

L’investissement a augmenté en moyenne de 7% au cours de la décennie comparé à 24% en Australie. Il est de notoriété publique que l’Afrique du Sud a raté l’explosion des matières premières et a perdu de l’investissement au profit de pays comme le Canada, le Chili et l’Australie, en partie à cause de la mauvaise qualité des infrastructures ferroviaires, énergétiques et portuaires. Mais le reste de l’Afrique australe se prépare à une nouvelle explosion des matières premières et à une accélération de la croissance en prenant de l’avance dans le jeu des infrastructures.

Des géants mondialisés de la mine comme Rio Tinto et Vale ont déjà ouvert des opérations au Mozambique et y financent les réseaux ferroviaires et portuaires. « Ces investissements auraient pu venir en Afrique du Sud. Transnet prend du retard » dit Christy Tawii, chercheuse associée à la société Frost & Sullivan. Ce projet permettrait à des sociétés minières locales d’éviter les ports sud-africains si une route alternative se créait pour acheminer les minerais vers les ports mozambicains.

« Les sociétés charbonnières du Mpumalanga-Limpopo, qui luttent pour acheminer leur charbon vers Richards Bay, pourraient utiliser les liens ferroviaires qui traversent le Zimbabwe et le Botswana pour atteindre le port de Maputo et le nouveau port en eau profonde qui est en construction dans le nord » dit Tawii. La réalité sur le terrain, c’est que les sociétés minières peuvent exporter 90 millions de tonnes de charbon par le terminal de Richards Bay mais que Transnet ne peut transporter que 60 millions de tonnes sur ses rails.

« La capacité du terminal de Richards Bay ne peut pas être supportée par l’infrastructure ferroviaire » dit un banquier d’investissement. «  En attendant, les exportateurs locaux de charbon ont la possibilité d’utiliser Maputo. Voilà pourquoi ce nouveau réseau ferroviaire et portuaire d’Afrique australe a des bases solides ».

Au Mozambique, une partie du réseau est déjà opérationnelle. Il y a trois couloirs ferroviaires principaux : un commence à Maputo a environ 80 km de Komatipoort à la frontière sud-africaine avec le Swaziland ; la ligne du nord va a Chicualacuala et est parallèle en gros au fleuve Limpopo en Afrique du Sud ; et la ligne du centre va de Beira au Mozambique à Sena sur le fleuve Zambèze.

Le chemin de fer Nacala, sur la ligne du nord, traversera le Malawi et aura la plus grande capacité de toute l’Afrique australe pour transporter le charbon depuis le Zambèze. Tawii a confirmé que Vale participait à la construction de la ligne, qui coûtera 1,6 milliards de dollars et sera terminée en 2015. De nombreux projets de routes, de ports et de services à l’exportation y sont liés.

Rio Tinto vient de terminer une étude préalable à la construction du port en eau profonde de Nacala à l’embouchure du Zambèze qui, d’après Tawii, « rivalisera directement avec le terminal de Richards Bay ». La ligne de chemin de fer vers Maputo est déjà en pleine activité. «  Pour les sociétés sud-africaines qui n’arrivent pas à sortir leur excédent de charbon de la région de Witbank, par exemple, et qui ne peuvent pas transiter par Richards Bay, le débouché naturel est Maputo. Ce couloir est donc une alternative pour l’exportation du charbon » dit un banquier.

Avant la guerre civile au Mozambique, plus de 12 millions de tonnes de charbon transitaient par le port de Maputo. Aujourd’hui c’est aux alentours de 4 tonnes. « On en est encore à rattraper le retard, mais le potentiel est énorme pour l’Afrique du Sud et pour le Mozambique », dit le banquier.
Les sociétés minières attendent aussi avec impatience l’ouverture de la ligne de Sena.

« Nous espérons que la ligne sera opérationnelle d’ici la fin de l’année, pour que Vale et Rio Tinto puissent sortir d’autres cargaisons. Les sociétés minières exercent une grosse pression pour pouvoir sortir les exportations. Vale projette actuellement une ligne parallèle à celle de Sena » dit Tawii.
Il y a une telle activité et à une telle vitesse au Mozambique que le  président Jacob Zuma y a, semble-t-il, emmené une équipe de Transnet. Transnet s’est dit que s’il perdait la partie chez lui, il pourrait participer ailleurs. « Transnet fournira 200 wagons et locomotives à Rio Tinto » Tawii a informé le Mail & Guardian.

Le gouvernement du Botswana espère que le projet ferroviaire de Ponta Techobanine servira de catalyseur pour diversifier ses routes commerciales et réduire sa dépendance aux diamants. Ce pays dépourvu d’accès à la mer cherche à mieux exploiter ses autres réserves minières comme le charbon en évitant «  de longues périodes de stockage aux ports d’entrée ».

Le Botswana ne possède qu’une seule ligne de chemin de fer qui relie le pays à l’Afrique du Sud au sud et au Zimbabwe à l’est. Au moment de la signature d’un précédent protocole d’accord entre le Mozambique et le Botswana en 2010, les media ont souligné la frustration qu’éprouvait le Botswana à être tributaire des réseaux portuaires et ferroviaires surchargés d’Afrique du Sud.

Le ministère des Transports et des Communications du Botswana n’a pas souhaité commenter le projet, pas plus que Transnet. Le société paraétatique a publié mercredi ses résultats pour les six premiers mois de l’année et annonce une amélioration de son activité de fret ferroviaire et dans ses ports.

Le volume des exportations de minerai de fer a augmenté de 21,5% pour atteindre 24.9 mégatonnes (20,5 en 2010). Bien que le volume des exportations de charbon n’ait augmenté que marginalement (2,6%) passant de 30,5 mégatonnes en 2010 à 31,3, le volume global du transport de fret a augmenté de 6,3%.

Les ports ont enregistré une meilleure productivité à l’aune de l’activité horaire des grues, au quai numéro 1 du terminal pour conteneurs de Durban, pour atteindre un niveau acceptable à l’échelle internationale. Mais Transnet a reconnu que la performance au quai numéro 2 avait baissé à cause des problèmes liés à la mise en place d’un nouveau système d’opération du terminal.

Lynley Donnely & Sharda Naidoo

Mail & Guardian du 28/10/2011

JOHANNESBOURG, AFRIQUE DU SUD

http://mg.co.za/article/2011-10-28-dotting-the-lines

traduction de JP et W Richard.